Méditation n°17 : pourquoi tu n’y arrives pas, même en t’engageant de toutes tes forces ?





Tu as tout essayé, Tu n’y arrive pas.

Malgré tous tes efforts, tu n’arrives pas à sauver l’Humanité et la Vie sur Terre.

Inexorablement, des millions de gens souffrent et meurent de la pollution de l’air, les écosystèmes sont détruits, les sols contaminés, l’air intoxiqué, l’eau salie, les forêts abattues. Des espèces disparaissent à un rythme effréné, la concentration en gaz à effet de serre continue d’augmenter dans l’atmosphère, des milliards d’êtres vivants périssent dans des gigafeux, des inondations noient des milliers de personnes et ravagent les villes, des sécheresses dévastent la nature et les cultures. La Biosphère devient peu à peu inhabitable, y compris pour l’Humanité. Tout cela est scientifiquement documenté.

Tu n’arrives pas à empêcher l’Écocide.

Pendant ce temps, inexorablement, la misère, la famine, la guerre et le génocide continuent de frapper les peuples. La haine, la peur et la violence rongent les cœurs. L’économie mondialisée exploite les humains et les non humains. Les individus dominés ploient le genoux sous le joug de la tyrannie puis sont réduits en esclavage. Les gens sont aliénés par l’illusion, l’aversion et le désir. On continue à tuer, à violer, à agresser, à piller, à détruire. On se querelle et on méprise son voisin, sa sœur, son frère. Pendant que l’Écocide se poursuit.

Tu n’arrives pas à empêcher le Mal.

Pourtant, tu t’engages de toutes tes forces. De toutes tes forces, tu veux répandre le Bien et tu veux vaincre le Mal.

Pourquoi n’y arrives-tu pas alors ?

Est-ce que tu t’y prends mal ? Est-ce que quelqu’un sabote tes efforts ?

Est-ce que tu entreprends une tâche impossible ? Es-tu condamné à l’impuissance ?

Est-ce que tu te prends pour un demi-dieu ? Est-ce que tu es mégalomane ?

Comment t’approcher de la pensée juste, de la parole juste, de l’action juste ?

Comment sortir de l’illusion, de l’aversion et du désir ?

Comment trouver la juste mesure de ta puissance d’agir effective ? Comment être tempérant ?

*

— Contemple le Réel tel qu’il est. Ouvre grand les yeux. Écoute attentivement. Hume profondément. Goûte cet instant. Enfonce tes pieds nus dans la terre. Que vois-tu ?
— Je vois le Mal…
— Pourquoi pleures-tu ?

— Parce que… j’ai mal.

— Pourquoi as-tu mal ?

— Parce que je souffre, atrocement.

— Et pourquoi souffres-tu ?

— À cause du Mal. À cause de tout ce mal que je vois partout, depuis toujours. Tous ces morts. Toutes ces victimes. Tous ces pleurs. Toute cette souffrance… Pourquoi ? Pourquoi ?

— Pourquoi à ton avis ?

— Je ne sais pas ! C’est absurde ! Je sais qu’il y a le Mal naturel, celui qui n’est pas causé par l’Humain : la maladie, l’accident, la vieillesse, la Mort. Mais pourquoi l’Humain ajoute-t-il son propre Mal ? Pourquoi les gens commettent-ils le Mal ? Pourquoi l’homme est-il un loup pour l’homme ? Pourquoi sommes-nous nos propres bourreaux ? Ne comprenons-nous pas ? N’avons-nous aucune mémoire ? Ne pouvons-nous tirer aucune leçon ? Sommes-nous condamnés à jamais à revivre, sans cesse, toujours, pour l’éternité, le Mal et la Souffrance ? Quand cela s’arrêtera-t-il ?

— C’est le Mystère du Mal que tu contemples, ami. Aucun sage, aucun philosophe, personne n’a jamais pu le percer. Le Mal fait partie de la Condition humaine. C’est le tragique de notre existence.

— Ça me fait une belle jambe ! Tu crois que je peux me contenter de ton satané « Mystère » ? Vraiment ?

— Que ressens-tu ?

— La colère, la rage, le dépit. J’ai envie de détruire ce monde malfaisant. Je veux que ceux qui commettent le Mal soient punis. Qu’ils souffrent à leur tour. Qu’ils crèvent !

— Ils souffrent déjà, sois en certain. D’ailleurs, la souffrance est peut-être une des principales causes du Mal que l’Humanité s’inflige. Mais à ton avis, pourquoi es-tu si en colère ?

— Parce que je suis révolté tiens ! Quelle question ! Je suis révulsé, horrifié, dégoûté par ce déchaînement de violence, par cette débauche de haine, par ce tsunami de bêtise ! Et je suis enragé parce que je me sens tellement impuissant ! Je n’arrive à rien changer !

— Que souhaites-tu ?

— Je voudrais… je voudrais mettre fin à tout ça, aux guerres, aux massacres, aux crimes, aux viols, aux discriminations, aux exploitations, aux dominations… je veux que tout cela cesse !

— Le fais-tu ?

— Ben j’essaie. Je ne suis qu’un homme. La nuit, je dois bien dormir. Le jour, je dois bien manger et boire. Entre la nuit et le jour, je dois travailler pour gagner mon pain. Et puis m’occuper de mon ménage, de ma famille, de ma femme et de mes enfants. J’essaie de trouver du temps pour m’engager. J’y consacre déjà beaucoup de temps, tu sais. Si j’en fais plus je m’épuise. Et je ne peux pas lutter contre tout ce qui va mal ! Je dois bien choisir mes combats. Et encore, je ne vais pas aux manifestations, je ne fais pas de désobéissance civile, je suis dégoûté des partis politiques et je ne vois nulle part une force capable d’empêcher cela. Et puis… oh et puis merde ! j’ai aussi bien le droit de vivre non ? J’ai bien le droit d’être heureux. À quoi ça servirait que je sois malheureux en plus ? À quoi ça servirait d’ajouter au malheur du monde ? Hein ?

— Tu as raison, à quoi, à qui, servirait ton propre malheur ? Comme chacun et comme tous, tu as le droit d’être heureux. Dans cet océan de souffrance et de malheur, la quête du bonheur pourrait bien être un devoir sacré.

— Ah bon, tu crois ?

— Oui, je le crois.

— Merci, ça me soulage que tu dises cela. Je tâche d’être heureux tu sais. Mais c’est vraiment pas facile avec tout ce bordel partout dans le monde. Il n’y qu’à allumer la radio ou la télévision pour être submergé par les mauvaises nouvelles. Et on est sûr de croiser chaque jour un ignare, un lâche ou un méchant, le Mal humain est partout. On est obligé de fermer les yeux, au moins à moitié. Sinon on devient fou. OK j’ai le droit d’être heureux. Mais ça n’explique pas pourquoi je n’arrive pas à empêcher le Mal, malgré mes efforts…

— Que fais-tu pour empêcher le Mal ?

— D’abord, j’essaie de ne pas le commettre.

— C’est déjà beaucoup. Songe que si tout le monde faisait cet effort, l’immense partie du Mal ne surviendrait pas, en toute logique.

— Ensuite, j’essaie de commettre le Bien.

— Bravo ! À nouveau, songe à ce qui se produirait si nous étions plus nombreux à éviter de commettre le Mal et à pratiquer le Bien au quotidien !

— Oui mais… l’enfer est pavé de bonnes intentions… paraît qu’Hitler croyait faire le bien de l’Allemagne.

— C’est vrai. L’enfer est pavé de bonnes intentions. Des millions de morts sont nés d’une volonté implacable de créer un « Homme nouveau » ou « des lendemains qui chantent ». Mais comment éviter cet écueil de la volonté du Bien qui génère le Mal ?

— Par la lucidité ?

— Oui, par la vision juste, débarrassée de l’illusion. En faisant l’effort de la lucidité implacable, de la conscience extralucide, tu réduis au minimum le risque d’effets indésirables à tes actes.

— Cela je m’y emploie. Mais est-ce suffisant ?
— Non ! Il y a aussi l’Amour, qui nait de l’Empathie, cette capacité à éprouver la souffrance de l’Autre.
— J’essaie d’aimer l’Autre mais franchement ce n’est pas facile. Il y a de ces cons je te jure ! Et j’ai aussi du mal à m’aimer moi-même en fait. Et puis quand je vois le degré de connerie autour de moi, je doute que beaucoup de mes semblables le fassent, l’effort de la lucidité et de l’Amour.

— Pourquoi selon toi, ne font-ils pas cet effort ?

— Je ne sais pas moi… ils sont mauvais, radicalement !

— Le crois-tu ?

— Non, OK. Ils ne sont pas tous mauvais. Beaucoup sont inconscients, mal éduqués, peu formés, et on leur a bourré le crâne avec des idées stupides, des idées fausses, des idées dangereuses, comme le racisme par exemple. Mais certains sont radicalement mauvais, Hitler, Poutine, tous ce tyrans sanguinaires.

— Oui, il y a des inconscients, des ignorants, des fanatiques… Et puis oui, il y a des individus qui se délectent de commettre le Mal. Des sadiques, des psychopathes, des tueurs en série, des tyrans sanguinaires oui. Malheureusement. Que faire contre ceux-là ?
— Je ne vois rien d’autre que les combattre, empêcher le Mal qu’ils veulent commettre.
— C’est la troisième voie d’action : ne pas commettre le Mal, commettre le Bien et empêcher la commission du Mal.

— Mais pourquoi est-ce que nous sommes encore et toujours victimes de ces tyrans sanguinaires ? Au fond, ce sont eux qui font le plus de victimes, par millions. Le Mal le plus grand, c’est celui qui est commis par le plus grand nombre, par des régimes totalitaires.

— Oui, excellente question. Pourquoi les masses suivent-elles aveuglément ces anges de la Mort ? Pourquoi parviennent-ils -car ce sont pour l’immense majorité des hommes-, pourquoi parviennent-ils toujours à nous hypnotiser, à nous captiver avant de nous capturer. Pourquoi réussissent-ils à fanatiser des centaines de millions d’individus, à les entraîner vers la guerre et le génocide ?

— Parce que nous n’avons toujours pas compris la nature du Pouvoir ?

— Oui.

— Parce que nous refusons toujours d’oser savoir, de nous connaître nous-mêmes, de comprendre que rien de ce qui est humain ne nous est étranger, parce que nous sommes rongés par l’illusion, l’aversion et le désir ? Parce que nous ne faisons pas assez d’effort pour nous améliorer ? Parce que nous échouons à comprendre que le pouvoir émane de chacun de nous, qu’il n’est jamais que prêté, et que nous ne devrions jamais le prêter à des tyrans sanguinaires ?

— Oui, il y a de ça. Mais aussi et surtout, beaucoup du Mal survient parce que nous avons peur. Nous avons peur de la Mort, nous avons peur de l’Autre, nous avons peur de l’Inconnu, de l’Étranger. Nous avons peur de nous-mêmes. Nous avons peur de la Vie. Nous avons peur de l’Existence. Nous avons peur de l’Univers. Nous avons peur de l’Absurde. Nous avons peur de tout. Nous échouons encore à nous dresser, fièrement, sur nos deux pieds, bien enfoncés dans la terre, sur cette Terre qui est notre berceau. Nous vivons séparés de la Mère-Terre, nous nous coupons de la Vie qui est nous, qui coule en nous, qui nous traverse, de ce souffle universel de la Vie, ce souffle merveilleux et gigantesque de la Vie, de l’Amour, de la Conscience, de la Paix, … Nous sommes si petits, si effrayés dans l’immensité de l’Univers. Alors nous avons peur, et nous nous sentons menacés, et nous voulons détruire la menace, nous voulons détruire l’Autre, l’altérité. Nous voulons tout contrôler, tout réguler, tout compter, tout stériliser, tout neutraliser, anéantir la moindre différence, anéantir l’Autre, anéantir ce qui n’est pas nous. Nous voulons jouir d’un pouvoir absolu alors nous prêtons notre pouvoir à des fous qui sont prêts à tout. Nous croyons pouvoir vivre pour toujours, nous voulons anéantir la Vie mais aussi la Mort. Nous nous détestons, nous qui sommes mortels. Nous détestons notre corps, notre matérialité, notre caractère vivant, notre chair, nos souffle, notre imperfection, nos limites, notre lien insécable avec la Terre, notre humanité, notre dépendance infinie à autrui, notre absolue vulnérabilité. Alors nous voulons nous venger, nous voulons faire souffrir, nous et l’autre. Faire souffrir l’Autre pour extérioriser notre propre souffrance. Nous voulons faire rendre gorge à l’Existence. Tout ça parce que nous ne savons pas simplement… aimer. Et accepter de souffrir sans devoir nous venger.

— C’est pour ça que nous commettons le Mal ?

— Je ne sais pas… peut-être ?

— Mais alors, que faire ? À quoi bon lutter ? À quoi bon s’engager ? Le Mal revient toujours, partout. Nous ne gagnerons jamais la bataille !

— Non, nous ne gagnerons jamais la bataille.

— C’est bien ce que je pensais. Nous avons perdu.

— Non.

— Non ?

— Non.

— Que veux-tu dire ?

— Qu’il y a une voie. Étroite mais réelle. Qu’il y a un interstice. Qu’il y a moyen de faire quelque chose, malgré tout.

— Quoi ?

— Se révolter. Et résister.

— Pourquoi ?

— Parce qu’on peut toujours minimiser le Mal.
— Toujours ?

— Toujours.

— Même dans la pire des situations, même au plus noir des ténèbres, même dans un camp d’extermination nazi ?

— Même dans la pire des situations, nous pouvons dégager un sentier meilleur. Même au plus fort des ténèbres, la lumière du Bien peut briller. Même dans un camp d’extermination nazi, la conscience pour se révolter et résister.

— C’est tout ?

— Il n’y a rien d’autre.

— C’est nul, décevant. Je veux plus.

— C’est comme ça. Il n’y a rien d’autre.

— Rien d’autre ?

— Rien d’autre. Alors que vas-tu faire ?

— Et bien… je suppose que je n’ai pas le choix.

— On a toujours le choix. Celui de décider ce que nous faisons du temps qui nous est imparti.
— Mais je n’ai qu’une vie !

— Tu as toute une vie.

— Je suis tout seul.

— Non tu n’es pas seul. Des millions d’autres ressentent la même chose que toi, depuis des millénaires. La lumière de la conscience brille depuis toujours au sein de l’Humanité. Elle a traversé les siècles, malgré l’obscurantisme, malgré l’ignorance, malgré la haine, malgré le Mal. Elle n’a jamais quitté l’Humanité même au plus fort des ténèbres, quand tous pensait que tout était perdu. C’est alors, dans les âges sombres, au pire moment, qu’elle brille de son plus fort éclat. Magnifique, éblouissante, majestueuse.

— Mais à quoi bon ?

— La conscience justifie toute l’aventure humaine. Elle est l’aventure humaine elle-même. Nous pouvons nous auto-détruire en tant qu’individu, société et espèce. Mais nous pouvons aussi nous auto-dépasser. Vers davantage de conscience.

— Alors c’est cela la clef ? La conscience ?

— Oui. Bouddha, Jésus, tous les sages, tous les philosophes, toutes les femmes et les hommes de Bien sont parvenus à cette conclusion. La conscience est la clef du Bien, et la solution au Mal. L’Existence est un mystère. Le mystère de l’Absurde, du Tragique, de la Souffrance, du Mal. Mais nous pouvons prendre mieux conscience de tout cela. Nous pouvons contempler l’Univers, la Vie, l’Humanité. Le Bien et le Mal. Le Mystère. L’Existence. Contempler, en méditant, c’est déjà faire la paix avec Soi, avec l’Autre, avec l’Univers. Nous pouvons réduire l’illusion, l’aversion et le désir. Nous pouvons réduire la Souffrance. Si nous pouvons le faire, nous devons le faire.

— Mais si je suis seul à le faire.
— Tu n’es pas seul. Tu ne seras jamais seul. Il y a l’Autre. L’Autre souffre aussi, comme toi. Comme toi, il a peur de la Mort, il a peur de tout.

— Mais justement, ce n’est pas moi, c’est l’Autre qui commet tout ce Mal que je ne parviens pas à empêcher ! C’est justement l’Autre qui m’empêche d’empêcher le Mal ! C’est l’Autre, la plus grande Adversité dans l’Univers. C’est l’Autre, mon adversaire !

— Oui. Et non. Tu as besoin de l’Autre. L’Autre, c’est Toi aussi, pour l’Autre. Ensemble, vous souffrez. Ensemble, vous pouvez lutter contre le Mal. D’autres se sont engagés avant toi, s’engagent avec toi, et s’engageront encore après toi. Le fil de la lumière ne sera pas rompu par ses fils et ses filles.

— Tu veux dire que je dois m’associer à d’autres pour lutter contre le Mal, m’engager dans des collectifs ?

— C’est évident. La puissance d’agir collective est plus que la somme des puissances d’agir individuelles. La puissance publique est la plus grande puissance d’agir composée. C’est avec le glaive de la puissance d’agir collective qu’on peut terrasser, bien que provisoirement, le dragon du Mal.

— Mais il y en a aussi qui s’associent pour commettre le Mal !

— Justement. Voilà pourquoi il faut nous associer en retour, nous les gens de Bien. Pour nous révolter et résister, ensemble. Car nous sommes plus fort ensemble. Car l’union fait la force. La force du Bien.

— Mais l’Autre est si inconstant, si imprévisible, si égoïste, si orgueilleux, si imparfait, si faible !

— Comme tu l’es.

— Oui mais moi j’ai fait tant d’efforts pour m’extraire de tout ça.

— Pas assez semble-t-il.
— Tu veux dire que je dois œuvrer, coopérer, m’engager, avec des gens moins conscients que moi ?

— Chacun fait son chemin. Partage ce que tu as appris. Sois patient.

— Mais je ne peux pas patienter, il y a Urgence, une urgence existentielle, c’est l’Écocide non de Dieu ! On ne peut pas attendre que la majorité s’éveille, on n’a plus le temps !

— Il n’y a pas de raccourci. Vos sorts sont liés. Vous vivrez ou périrez ensemble, les conscients et les inconscients, ceux qui ont des yeux ouverts ou fermés, des oreilles attentives ou inattentives.

— Et donc, l’Autre, qui est la plus grande cause du Mal, est aussi mon plus grand allié ?

— Oui. Et inversement ! N’as tu jamais commis le Mal ?

— Si mais tout cela est paradoxal !

— Oui mais c’est comme ça. Certains autres sont plus conscients que toi, apprends auprès d’eux.
— D’accord. Mais pourquoi n’y arrivons pas, nous les gens de Bien, qui œuvrons depuis des siècles, en engageant toutes nos forces dans la bataille ? Tous ces sages, tous ces philosophes, tous ces génies, ils n’ont pas réussi à éradiquer le Mal ! Pourquoi n’y a-t-il aucun progrès moral et politique dans l’Histoire ? Malgré les efforts de ces millions d’êtres humains, d’activistes, de militants ? Pourquoi le Mal semble-t-il toujours si triomphant après autant de millénaires de civilisation ? Qu’est-ce qui ne va pas chez nous ?

— Je te l’ai dit, c’est impossible. Le déterminisme dans l’Univers est gigantesque. Il y a une terrible inertie dans le monde, dans l’infrastructure, dans les institutions, dans la culture, dans la société, chez les gens, dans leur cerveau, dans leur famille, dans leur éducation. Il est extrêmement difficile pour un individu ou un collectif de modifier d’un iota la trajectoire de l’ensemble. Il est très difficile de faire virer le paquebot Humanité. Tout au plus, nous pouvons espérer des élans majoritaires le plus souvent possible. Des coalitions des bonnes volontés prêtes à s’engager en même temps et à redoubler d’effort. Tout au plus, nous pouvons espérer des moments d’Éternité, individuellement et collectivement, avec tout la Vie sur Terre, avec l’Univers. Il y aura toujours le Mal. Mais nous pourrons toujours nous révolter et résister, ensemble. Minimiser le Mal demande un investissement de tous les instants, une lutte collective non seulement de la minorité active mais aussi de la majorité trop souvent passive et un volonté farouche de faire mentir tous les déterminismes, la résistance absolue du Réel pour créer du radicalement neuf. Alors surviennent ces instants suspendus, les âges d’or de l’Humanité. Nous sommes encore des enfants. Les monstres sont nés de notre indifférence collective, les monstres sont nés en nous. Les âges sombres naissent de l’abandon de la lutte. Il faudra toujours se révolter. Il faudra toujours résister.

— C’est tout ?

— C’est tout pour aujourd’hui. Maintenant repose-toi.





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