« Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités. »

L’oncle Ben, Spiderman


« Agis de façon que les effets de ton action soient compatibles avec la permanence d’une vie authentiquement humaine sur Terre. »

Hans Jonas, Le Principe responsabilité, 1979.


— Responsabilité : substantif féminin

  • A – 1. Obligation faite à une personne de répondre de ses actes du fait du rôle, des charges qu’elle doit assumer et d’en supporter toutes les conséquences. Accepter, décliner, dégager, encourir, endosser, engager, prendre, refuser, rejeter, revendiquer une responsabilité; idée, part, sentiment de responsabilité; sous ma/ta/sa responsabilité.
  • 2. Spécialement
    • DROIT ADMINISTRATIF Responsabilité (de la puissance publique).
    • DROIT CONSTITUTIONNEL Responsabilité politique.
    • DROIT CIVIL Responsabilité civile. Obligation pour une personne de réparer un dommage subi par autrui à la suite de l’événement dont elle est responsable.
    • DROIT PÉNAL Responsabilité pénale. « Obligation de répondre de ses actes délictueux en subissant une sanction pénale dans les conditions et selon les formes prescrites par la loi »
    • DROIT COMMERCIAL Société à responsabilité limitée (S.A.R.L.). Société dans laquelle la responsabilité des associés est limitée au montant de leur apport.
  • Par extension, souvent au pluriel Charge entraînant la prise de décisions importantes et obligeant celui qui en est investi à rendre compte de ses actes et de ses résultats à ceux qui la lui ont confiée. Responsabilité professionnelle; accepter, être investi de hautes, importantes, lourdes responsabilités.
Trésor de la langue française


Comme le terme l’indique, la responsabilité est le phénomène qui survient lorsqu’un être humain est sommé en principe de répondre de ses actes auprès de lui-même et de la communauté humaine, présente et future, au sujet d’un bien -une personne, un être vivant ou une chose-, dont il a la charge, au moins implicite, de garantir l’intégrité dans la limite de sa capacité d’action.

Qui est responsable ?


Notre conception intuitive de la responsabilité ne s’impose ni aux animaux, ni aux plantes, ni aux objets inertes eux-mêmes. S’ils peuvent être objets de responsabilité, ils ne peuvent être sujets de responsabilité. Nous n’attribuons de responsabilité qu’aux êtres humains, et uniquement à certaines conditions.

Notre conception juridique de la responsabilité exclut également tous les cas dits « d’irresponsabilité« , comme l’incapacité mentale (handicap mental, sénilité, emprise de psychotropes), le trop jeune âge (enfants), la légitime défense, l’erreur invincible ou l’automatisme (épilepsie, somnanbulisme, etc.).

Notre conception juridique de la responsabilité module également celle-ci en fonction de notre situation personnelle (âge, expertise, expérience, emploi, fonction, rang, moyens à disposition, etc.), du bien dont on a la responsabilité (enfant, malade, blessé, objet précieux, etc.) de sa relation avec autrui (relation d’autorité, relation parentale, représentation de l’autorité, etc.) et des circonstances environnantes, aggravantes ou atténuantes (situation de catastrophe naturelle, de guerre, de stress, de maladie, etc.). On parle du degré de responsabilité.

Le fondement éthique ultime de la responsabilité est la capacité à faire ou à ne pas faire, c’est-à-dire la puissance d’agir sous le pouvoir de la conscience et, plus précisément, à faire autrement, à choisir une option alternative. Nous dégageons de toute responsabilité les animaux, les plantes et les objets inertes parce que nous considérons qu’il n’ont aucune possibilité de se « comporter » autrement que comme ils le font. S’ils ont une puissance d’agir non nulle, elle n’est pas soumise à une conscience capable de l’orienter différemment. De la même manière, nous jugeons de facto irresponsables, en tout ou partie, les êtres humains incapables d’agir différemment que ce qu’ils ne font (incapacité mentale, jeune âge, etc.). Enfin, nous modulons la responsabilité que nous attribuons à une personne en fonction de sa situation personnelle, de sa relation avec autrui et des circonstances lors de l’action. Une personne placée dans un situation, dans une relation et des circonstances dans lesquelles elle « ne pouvait pas faire autrement » sera jugée irresponsable des conséquences de ses actes (légitime défense).

Par défaut, nous estimons donc que l’individu humain est responsable de ses actes et que l’irresponsabilité est une exception à la règle.

Nous étendons la responsabilité aux groupes d’individus de toutes sortes et de toutes tailles, pour en faire une responsabilité collective. Cela démontre notre reconnaissance du phénomène de puissance d’agir et de conscience collectives. L’individu peut donc être responsable individuellement mais aussi en fonction de son appartenance et de son rôle dans un groupe d’individus.

Une plus grande puissance d’agir individuelle et un rôle de pouvoir plus important dans une relation ou dans un groupe impliquent un plus haut degré de responsabilité a priori. C’est pourquoi nous parlons d’une personne qui a « de grandes responsabilités » ou du « responsable » d’une organisation ou d’une tâche.

La puissance d’agir brute doit s’accompagner d’un certain degré de conscience, notamment de conscience de notre puissance d’agir. Une personne qui essaie d’agir bien mais qui ignore qu’elle aurait pu agir autrement (par exemple qui ignore qu’elle aurait pu appuyer sur tel bouton pour arrêter une machine dangereuse dont l’utilisateur est tombé inconscient) n’est pas responsable de ne pas agir autrement.

L’émergence de l’IA interroge notre conception intuitive de la responsabilité. Tant que l’IA est jugé incapable d’agir autrement, nous pouvons la juger irresponsable de facto. Cependant, si des IA capables d’une certain niveau de conscience et d’action alternative émergeaient, notre conception intuitive nous imposerait de leur attribuer une forme de responsabilité.

Enfin, notons que tous les raisonnements qui précèdent reposent sur le postulat de l’existence du libre-arbitre et du non-déterminisme absolu de l’Univers. Sans liberté (d’agir autrement), il ne peut exister, en toute logique, de responsabilité.

Quand est-on responsable ?


On peut être potentiellement ou actuellement responsable.

On l’est toujours potentiellement lorsqu’on conçoit qu’un événement générateur de responsabilité peut survenir à tout instant, par surprise, et qu’il faudra alors se montrer digne de la responsabilité qui s’impose à nous (aide à personne en danger par exemple).

On l’est actuellement dès lors qu’un événement normal et prévisible survient comme l’accès à la majorité civile, l’accès à la parentalité, l’accès à un emploi, une fonction, une charge publique, la réception d’une tâche, d’une mission, d’un ordre, etc.

De qui et de quoi est-on responsable ?


On peut être potentiellement ou actuellement responsable de soi, d’un Autre (humain ou non humain) ou d’une chose (matérielle ou immatérielle).

On est toujours responsable d’un Bien, c’est-à-dire d’une entité qui a de la valeur d’un point de vue éthique. Et on est toujours responsable de sauvegarder ce Bien contre le Mal, c’est-à-dire contre les entités qui peuvent dégrader voire détruire ce Bien.

Ainsi le parent est responsable de la vie, de la santé, du bien-être et de l’éducation de son enfant, la cheffe de l’Etat est responsable de gouverner en vue de sauvegarder la vie, la santé, le bien-être et la prospérité de la population et du territoire administrés, le médecin est responsable de soigner son patient le mieux possible, le gardien de musée est responsable de protéger les œuvres artistiques contre le vandalisme, nous sommes collectivement responsables de protéger la Biopshère en tant qu’Humanité, etc.

Vis-à-vis de qui est-on responsable ?


On est responsable vis-à-vis de l’être humain ou non humain, ou de la chose, dont on est responsable, et on est responsable vis-à-vis de tous les êtres dont le bien dépend de l’être ou de la chose dont on est responsable.

Autrement dit, on est toujours responsable vis-à-vis d’êtres vivants, de ces êtres vivants eux-mêmes (dont soi-même), des autres êtres vivants qui font partie de leur bien, et de toutes les choses qui font partie de leur bien.

Par extension, on est responsable de groupes d’êtres vivants et de groupes d’objets, jusqu’aux plus grands ensembles, comme l’Humanité, la Vie et la Biosphère.

Comment être responsable ?


La responsabilité appelle une éthique de responsabilité. Cette éthique implique un soucis pour le Bien dont on est responsable, une euristique de la peur que ce Bien soit dégradé ou détruit et donc un Engagement, c’est-à-dire une prise de responsabilité en actes.

Les archétypes de la responsabilité sont celui du parent pour l’enfant et celui de la femme ou de l’homme d’État pour la population et le territoire dont il a la charge. Ces deux archétypes engendrent une responsabilité totale. La vie de l’enfant est entièrement entre les mains du parent. L’avenir de la population et du territoire est entièrement entre les mains de la femme ou de l’homme d’État, en raison de leur puissance d’agir respective. Un défaut d’action de leur part peut générer la destruction totale des vies dont ils ont la charge.

Les limites de la responsabilité


Les limites de la responsabilité sont celles de la puissance d’agir de l’être humain responsable, en connaissance de la puissance d’agir maximale d’un individu.

C’est en-deçà de ces limites qu’un individu peut être responsable car il n’a pas la puissance d’agir autrement.

Les limites de notre responsabilité collective sont celles de la puissance publique, de la puissance de l’Humanité.


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