« Now, here, you see, it takes all the running you can do, to keep in the same place. »

The Red Queen to Alice, Through the Looking-Glass, Lewiss Caroll, 1871.


« Aucune nation ne peut sortir de la croissance sans se faire doubler par les autres. La seule issue est au niveau mondial. Saurons-nous un jour nous unir pour maîtriser notre taux de dissipation d’énergie ? »

François Roddier, astronome


Dans ce billet, je voudrais proposer une hypothèse prospective que j’appellerais « hypothèse de la reine verte », par analogie avec l’hypothèse de la reine rouge. Cette hypothèse, si elle est vérifiée, présente un obstacle rédhibitoire à la généralisation de la décroissance puis de la post-croissance comme nouveau paradigme civilisationnel mondialisé. Si l’on est convaincu que la décroissance et la post-croissance de manière générale forment ensemble un paradigme indispensable pour éviter les pires scénarios d’effondrement et d’extinction qui menacent l’Humanité, alors il devient nécessaire de formuler des solutions politiques et institutionnelles capables de neutraliser les effets de cette « hypothèse de la reine verte ». Si ces solutions politiques et institutionnelles échouent à se mettre en œuvre pour des raisons contingentes, ou se révèlent impossibles à mettre en œuvre, pour des raisons déterministes, alors l’hypothèse de la reine verte fait partie des éléments de solution au paradoxe de Fermi. C’est-à-dire que toutes les espèces intelligentes et conscientes qui croissent sans s’autolimiter dans l’Univers en subissent les effets délétères, transgressent les limites de leur biosphère, en détruisent l’habitabilité, et finissent par s’effondrer ou disparaître.

Pour bien comprendre cette proposition d’hypothèse de la reine verte, il s’agit d’abord de faire un détour par l’hypothèse de la reine rouge.

L’hypothèse de la reine rouge est une hypothèse scientifique proposée en 1973 par le biologiste de l’évolution Leigh Van Halen (1935 – 2010).

Le nom de l’hypothèse fait référence à une scène d’un roman de Lewiss Caroll intitulé De l’autre côté du miroir, qui fait suite aux Aventures d’Alice au Pays des Merveilles. Dans cette scène, Alice se retrouve avec la Reine de Cœur sur un échiquier mobile où elles doivent courir pour pouvoir rester sur place. Devoir courir sans cesse pour rester sur place, voilà l’idée au cœur de l’hypothèse de la reine rouge.

Cette hypothèse pose que les espèces doivent constamment s’adapter, évoluer et proliférer pour survivre face à des espèces adverses en constante évolution. Elle utilise le constat que dans les écosystèmes, les espèces ne font pas qu’évoluer en fonction de leur environnement en général, elles co-évoluent également en fonction des autres espèces particulières qui peuplent le même environnement, certaines étant leurs prédateurs, d’autres leurs proies et d’autres encore des compétiteurs pour les mêmes ressources au sein de l’écosystème. Un exemple qui illustre ce phénomène est qu’il doit exister un équilibre entre la valeur sélective d’un prédateur et celle de sa proie, par exemple entre le lion et la gazelle, pour que les deux espèces puissent coexister à long terme – la valeur sélective étant la capacité d’un individu d’un certain génotype à se reproduire. Si la valeur sélective du lion augmente -si par exemple il devient plus rapide et attrape plus de gazelles, ce qui lui permet de mieux se reproduire-, alors une pression de sélection s’exerce sur la population de gazelles qui favorise la survie de ses individus les plus rapides, au risque que les gazelles disparaissent si les lions deviennent trop efficaces, en ne laissant pas le temps aux gazelles d’évoluer sur plusieurs générations. La population de gazelles, sous la pression d’une population de lions plus rapides, tant qu’elle parvient à survivre au travers d’individus plus adaptés, aura donc tendance à évoluer vers davantage de rapidité. Ainsi, les deux populations, de lions et de gazelles co-évoluent selon une forme de « course aux armements » qui leur permet de garder plus ou moins constant le « rapport de force » entre elles, et donc de survivre ensemble à long terme.

L’hypothèse de la reine rouge est complexe à plus d’un titre. Elle est systémique car elle identifie des éléments en interaction via des liens de rétroaction réciproques, elle est dialogique car ces éléments restent en tension et ne se neutralisent pas, elle constitue une forme d’émergence car elle ne peut être déduite de la simple analyse de ses composantes, et elle recèle des réactions imprévisibles, des singularités, effets de seuils et changements d’équilibre. Un écosystème se révèle ainsi la résultante de la co-évolution de milliers d’espèces en relations tantôt concurrentes tantôt symbiotiques, au travers d’une interaction spatio-temporelle de longue durée. Le formidable foisonnement de la vie est une course aux armements dynamique où chaque espèce est obligée de courir de toutes ses forces, pour rester à la même place, c’est-à-dire pour se perpétuer dans un milieu sans cesse changeant.

L’hypothèse de la reine rouge ne s’applique pas seulement aux relations entre espèces mais aussi aux relations intra-espèce, notamment car elle s’applique à la reproduction sexuelle. Certains travaux scientifiques ont ainsi montré qu’il existait également par exemple une forme de « course aux armements » entre les mâles, entre les femelles, et entre les mâles et les femelles d’une espèce sexuée. Cette compétition intraspécifique impose une pression de sélection qui exige de chaque partie de co-évoluer au sein même de son espèce. Ainsi les femelles de certaines espèces « développent des stratégies » pour pouvoir sélectionner un nombre limité de mâles qui peuvent les féconder tandis que les mâles développent des stratégies pour pouvoir passer outre cette sélection et féconder un maximum de femelles différentes. Les mâles sont sélectionnés au sein de cette espèce en fonction de leur valeur sélective, ainsi que les femelles. Un exemple est l’hypertrophie relative des mâles par rapport aux femelles dans certaines espèces comme les bisons ou les morses. Où l’on voit que les mâles sont en compétition entre eux pour obtenir la possibilité de se reproduire en tant que dominant, ce qui favorise leur grande taille pour remporter les combats lors de la saison de reproduction. Mais où certains mâles non dominants tirent leur épingle du jeu via des stratégies de reproduction furtives, avec la complicité de certaines femelles qui échappent à la vigilance du mâle dominant. A nouveau, toutes et tous doivent sans cesse courir pour rester sur place. Si la course à la taille s’arrête chez certaines lignées de mâles, ces mâles risquent de ne plus pouvoir se reproduire et leurs caractères génétiques ne seront plus transmis. Etc.

Il est toujours délicat de transposer des constats relatifs à la biologie évolutive à l’espèce humaine, et encore plus aux sociétés humaines. Sans vouloir effectuer cette transposition, la simple analogie suffit à fonder l’hypothèse de la reine verte.

Nul ne peut nier que les humains entrent en compétition entre eux depuis toujours. Cela sans nier la tendance tout aussi importante de la coopération et de l’entraide qui elle aussi, peut apparaître comme un facteur d’avantage compétitif, entre groupes humains cette fois. Les rivalités d’ego, les joutes verbales, les combats physiques, les duels armés, les compétitions sportives et artistiques, les querelles d’ambition et de réputation, les luttes politiques et économiques et les guerres témoignent de l’ampleur des forces de compétitions qui règnent au sein des sociétés humaines, à toutes les échelles, aussi loin que porte la mémoire et l’archéologie.

Pour tirer son épingle du grand jeu de la compétition, la puissance et le pouvoir relatifs, de manière générale, sont déterminants. L’un l’emporte sur l’autre, pacifiquement ou non. Qui épousera qui ? Qui soulèvera la coupe ? Qui remportera le marché ? Qui gagnera les élections ? Qui vaincra son ennemi dans la bataille ? Qui conquerra le monde ? Qui sera la superpuissance ? Tous les coups sont permis ou bien sont strictement codifiés.

Les forces de compétition peuvent conduire à des grandes réalisations humaines par le jeu de l’émulation ou aux pires barbaries, au mal absolu.

Le rapport relatif entre les valeur sélectives des individus et des espèces, en constante co-évolution, permet de formuler l’hypothèse de la reine rouge. Mais il faut souligner qu’il explique aussi la constance d’événements d’extinction d’espèces. Parfois, la course est perdue par un des concurrents. Il n’a pu évoluer autant et aussi vite que ses concurrents, est surclassé, n’accède plus aux ressources de l’écosystème, ne peut plus assurer sa survie et sa reproduction. Il disparaît.

Lorsque l’évolution de la puissance de l’un le met en capacité d’éliminer l’autre, on franchit un seuil critique. Car la puissance d’agir en général, c’est autant la puissance de survivre, de vivre, de créer, de produire et de se reproduire, que, potentiellement, la puissance de tuer, de détruire, d’empêcher la production et la reproduction de l’Autre.

A nouveau, revenons aux affaires humaines. Que constate-t-on à travers l’histoire ? L’émergence, l’essor, le climax, le déclin et l’effondrement, ou la renaissance !, des organisations et groupes humains, des empires, des sociétés, des Etats, des cultures, des villes et pays. Et cette vie des groupes humains ne se produit pas en vase clos, elle est souvent fortement déterminée par l’activité des autres groupes humains cohabitants ou voisins, alliés ou concurrents. Et, de manière générale, tendent à disparaître les sociétés qui ne sont pas en mesure de se protéger contre les velléités de destruction ou d’absorption des autres sociétés.

En histoire des sociétés humaines, le principe de « manger ou être mangé » du vivant semble doté d’un important pouvoir explicatif. Dans le monde humain également, le gros a tendance à manger le petit et le petit doit employer certaines stratégies pour éviter d’être mangé par le gros.

La puissance d’agir peut être comprise dans un sens quasi physique de puissance énergétique, matérielle et informationnelle, dans le cas des sociétés humaines. Cette puissance sociétale se décline en puissance scientifique, technologique, économique, sociale, culturelle, politique, militaire. Certaines sociétés ont des capacités de domination, d’exploitation et de destruction qui leur permette de subjuguer voire détruire d’autres sociétés moins puissantes.

Au travers des lois de l’évolution, survivent les êtres vivants capables de survivre dans un milieu, donc de vivre assez longtemps pour se reproduire et voir leurs descendants vivre à leur tour dans ce milieu. Au travers de l’histoire humaine, persistent également les sociétés capables de persister dans un contexte historique. Ce constat de pression sélective a un caractère de nécessité logique qui permet de formuler une loi de l’évolution et de la sélection universelle, généralisée à tous les phénomènes organisés, même abiotiques. Demeurent les phénomènes capables de demeurer, c’est-à-dire capables de s’auto-entretenir en étant résilient et robustes aux autres phénomènes qui peuvent les faire cesser. Voilà une formulation générale de cette loi de l’évolution généralisée à tous les phénomènes universels. Les sociétés humaines n’y échappent donc pas, par nécessité logique.

La puissance sociétale, ou civilisationnelle, prise dans un sens quasi physique de puissance énergétique, matérielle et informationnelle (par exemple via la quantité d’énergie, de matière et d’information transformée), présente des caractéristiques nécessairement asymétriques. On ne peut se contenter d’une approche réductionniste qui se focalise sur une seule société à la fois. Il faut examiner le système et les liens d’interdépendance entre les sociétés pour comprendre les phénomènes de co-évolution et de sélection. Une société est puissante ou pas relativement à une autre, relativement à toutes les autres. Une société significativement moins puissante en ce sens n’a pas la capacité de dominer, d’exploiter ou détruire une société significativement plus puissante. Alors que l’inverse est vrai.

Les indiens d’Amazonie, les tribus africaines, la plupart des peuples premiers n’avaient pas la capacité physique de dominer, exploiter ou détruire des sociétés agraires voire impériales voisines. Tandis que les sociétés agraires pouvaient le faire. Ensuite, les sociétés industrielles purent subjuguer des sociétés agraires, et ainsi de suite jusqu’à ce que naissent des superpuissances coloniales capables de dominer et exploiter des pans entiers de la planète et de la population mondiale, souvent au travers de génocides, de massacres et de destructions culturelles massives.

Une course à l’armement historique règne au sein de l’Humanité depuis les débuts de l’Histoire, depuis l’émergence des civilisations du Moyen-Orient, d’Europe, d’Asie, d’Afrique et d’Amérique. Le fer, le cheval, la poudre à canon, l’acier, le cuirassé, le char et l’avion ont servi de moyens d’établissement de la puissance géopolitique. Apparurent les armes de destruction massives comme les armes nucléaires, qui illustrent bien le summum du sens de la puissance géopolitique : la capacité à raser des pays entier et à exterminer quasiment toute une population. La capacité de destruction militaire, depuis des millénaires, signifie la puissance géopolitique.

Aujourd’hui, l’intelligence artificielle et les armes autonomes sont en passe de redéfinir les contours de la puissance géopolitique, et peuvent influencer toutes les conclusions de ce billet.

Il apparaît alors une relation très importante entre la croissance économique, indexée sur la croissance énergétique, matérielle et informationnelle, elle-même indexée sur la croissance scientifique et technologique, et la croissance des moyens énergétiques fossiles et nucléaires, qui permettent d’exploiter les ressources matérielles et informationnelles. On pourrait quasiment traduire la puissance géopolitique d’une société donnée en dollars de PIB, et ensuite en Joules d’énergie.

Des équilibres de puissance relative se forment qui expliquent l’extension relative des territoires et relations économiques des sociétés, et parfois ces équilibres se rompent et déclenchent des guerres et des reconfigurations des territoires, des populations, des économies, des cultures et des rapports de domination et d’exploitation.

C’est là qu’il nous faut aborder la proposition de la décroissance. La recherche de l’avantage compétitif de la puissance dans les relations humaines, via une « course aux armements » de toutes natures (militaires, économiques, culturels, etc.) déclenche des phénomènes de croissance multidimensionnels à l’échelle du monde, dont la somme finit par se heurter aux limites planétaires, au point de menacer l’Humanité dans son existence même. Car cette débauche de puissance physique sème la mort et la destruction au sein de la Biosphère, dont tous les équilibres sont perturbés, et où les effondrements s’accumulent. Avec la Grande Accélération, nous sommes entrés en Anthropocène, et l’Ecocide menace de détruire l’habitabilité planétaire. nous sommes confrontés à l’Urgence écologique.

Depuis l’émergence de la civilisation il y a 10 à 12.000 ans, après des dizaines de millénaires de relative stabilité entre les sociétés humaines dans le monde, s’est consolidé un avantage sélectif à la puissance physique brute. Les gros dominent, exploitent ou détruisent les petits, sans que les petits ne puissent plus tirer leur épingle du jeu. Aujourd’hui, le capitalisme et le néolibéralisme issus d’Occident et repris largement par des puissances non occidentales, dominent et exploitent largement le monde entier. De moins en moins de sociétés premières demeurent. La plupart se meurent. Les grandes puissances se mesurent à coup de porte-avions, de fusées, de super-ordinateurs et d’aéroports géants, à coup de dollars de PIB et de Joules d’énergie.

Face à la transgression de toutes les limites planétaires, face à l’Ecocide, apparaît la thèse de la décroissance. Comme la puissance géopolitique est corrélée à la puissance militaire, elle même corrélée à la puissance économique et donc in fine, à la puissance énergétique, matérielle et informationnelle (qu’on pourrait résumer en Joules), la décroissance implique quasiment à coup sûr une baisse drastique de cette forme-là de puissance géopolitique.

Dès lors se pose la question géopolitique centrale qui menace toute velléité de décroissance : si on veut rapetisser pour respecter les limites planétaires et garantir la survie et le bien-être de l’Humanité, comment les pionniers de ce mouvement de décroissance pourront-ils garantir leur sécurité, c’est-à-dire garantir que plus petits, ils ne seront pas dévorés par les gros, c’est-à-dire les croissantistes ? Etant donné que le rapport relatif de puissance détermine les équilibres géopolitiques internationaux et inter-sociétés, et donc leur capacité à se perpétuer selon leur conception culturelle propre, et que ce rapport relatif de puissance repose sur l’usage massif de combustibles fossiles et nucléaires, et même d’énergie renouvelable, comment préserver son autonomie culturelle (et donc son modèle décroissant), si sa puissance géopolitique relative baisse en même temps que se déploie la décroissance ?

Ainsi nous voilà revenus à l’hypothèse de la reine rouge. Et si, dans la compétition entre sociétés humaines, s’arrêter de courir était impossible si on voulait rester sur place ? Et s’il était impossible de mener la décroissance, au risque d’être dominé, exploité ou détruit, et dans tous les cas réintégré de force dans la dynamique croissantiste, dès lors qu’on baisserait la garde en abandonnant la puissance économique en dollars, et donc la puissance physique en Joules, indexée sur les fossiles, le nucléaire et même le renouvelable ?

Que faire si abandonner la croissance mène à sa propre perte ?

Voilà où se situe l’hypothèse de la reine verte que je voudrais formuler ici en termes de prospective.

La décroissance mondialisée est peut-être (j’en suis convaincu), indispensable pour solutionner le problème de l’Urgence écologique.

Mais la décroissance pose un grave problème de sécurité géopolitique pour les territoire et sociétés qui voudraient la mener à bien. En abandonnant la croissance, elles abandonneraient de facto les vecteurs physiques de la puissance géopolitique indexés sur le fossile, le nucléaire ou même le renouvelable. Et risqueraient donc de ne pas pouvoir « sanctuariser » leur expérience démocratique.

Dans l’hypothèse de la reine verte, la sélection « naturelle » exerce ses forces de sélection à l’échelle de sociétés humaines entières, en compétition les unes avec les autres, avec leur paradigme économique dominant, croissantiste ou décroissant.

La capacité des sociétés croissantistes à détruire les sociétés décroissantes dans l’œuf, à empêcher même leur émergence par leur domination sans partage de l’économie mondialisée, constitue une menace significative pour le futur de l’Humanité, dont, à ma meilleure connaissance, je n’ai pas encore entendu parler dans la littérature sur la décroissance.

Pour devenir crédible, la décroissance doit donc proposer une théorie de l’Etat, cela a déjà été dit, mais aussi une théorie de la puissance, en particulier de la puissance géopolitique.

Il se pourrait qu’il faille concevoir des institutions internationales adéquates pour garantir la sécurité de tous les territoires et de toutes les populations dans une perspective de décroissance mondiale démocratique.

Il se pourrait également que l’hypothèse de la reine verte connaissance une issue surprenante pour la conception actuelle, millénaire, de la puissance géopolitique (l’âge du fer). Il se pourrait que les territoires et populations décroissantes, dans les effondrements qui émaillent déjà l’Anthropocène, se révèlent, in fine, plus puissantes, en terme de puissance d’agir collective, et de puissance géopolitique, que les territoires et populations croissantistes voisines. Il se pourrait que les armes nucléaires, les porte-avions, les fusées, les missiles, les chars, et autres vecteurs classiques de puissance militaire, se révèlent in fine très peu utiles face à des territoire écorésilients, capables d’assurer la satisfaction des besoins humains fondamentaux en eau, alimentation, logement, santé, etc.

Pour ceux qui veulent aller plus loin, je propose dans un autre billet quelques réflexions prospectives contre-intuitives sur ce sujet, où l’on mêle la décroissance et l’arme atomique. L’arme atomique a cette caractéristique de décorréler une certaine puissance géopolitique de l’usage massif des combustibles fossiles. De petites nations décroissantes dotées de l’arme nucléaire pourraient-elles sanctuariser leur expérience démocratique ?

Sans aller jusqu’à ces éléments de puissance « absolus », les effets de l’hypothèse de la reine verte jouent selon moi déjà à des échelles micro et méso. Il me semble que beaucoup d’individus et d’organisations sont menacés dans leur existence dès lors qu’ils décroissent, par le simple fait qu’ils se retrouvent alors surclassés et menacés, dans des tas de domaines, par les individus et organisations croissantistes qui les entourent, et ne peuvent donc pas se perpétuer structurellement de manière décroissante.

Si tu veux la décroissance, prépare la guerre… Peut-on éviter de se poser cette question de la puissance quand on pense la décroissance ?




3 réponses à “Décroissance et Puissance : l’hypothèse de la reine verte”

  1. Avatar de Olivier
    Olivier

    Très intéressant, merci !

  2. Avatar de Sam
    Sam

    Merci!

    Deux sources intéressantes (littérature, pas essai) pour creuser un peu la thématique : Le paradoxe de Fermi de JP Boudine et La forêt sombre de Liu Cixin (T2 de la trilogie Le problème à trois corps)

  3. Avatar de Bruno Kestemont
    Bruno Kestemont

    Ce raisonnement est typique de l’époque victorienne qui a elle-même fait changer Darwin de terminologie (pour s’adapter aux pupulisme victorien) dans ses éditions successives de l’évolution des espèces. Il n’y a pas de « loi du plus apte » ou « du plus fort » dans la première édition de l’évolution des espèces. Dans un monde visqueux (avec des frontières naturelles et une flêche du temps), rien ne se passe comme tu l’indiques. La très grande majorité des gens vivent en indifférence lointaine et en coopération proche. Les conflits et autres morts violentes ne représentent qu’un pourcentage infime de la mortalité humaine ou animale: la plupart des gens meurent (de maladies de) vieillesse.

    Voir le 2ème chapitre ici:
    https://www.researchgate.net/publication/264474963_Les_modeles_de_developpement_et_les_histoires_d'evolution_a_l'epreuve_de_l'incertitude_radicale_et_de_l'irreversibilite

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